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lundi 9 décembre 2013

Fumé

Temps sec et froid, les quelques feuilles mortes encore accrochées à leur branche m'ont rappelé une expérience tentée il y a quelques années maintenant.
A l'époque, j'avais publié un billet dans lequel j'essayais de reprendre la technique de fumage d'un chef de La Rochelle. Le but de sa technique n'était pas réellement de fumer comme on le ferait avec une viande ou un poisson crus, mais uniquement de communiquer aux aliments une délicate saveur fumée. C'était avec des aiguilles de pin et le résultat était plus que satisfaisant. Avantage : pas besoin d'un véritable fumoir, pas besoins de sciure non plus, une petite poignée de feuilles brûlées sous un saladier en guise de cloche suffisent !

Mais finalement, pourquoi n'utiliser que du pin ? Pourquoi ne pas essayer la même technique avec des feuillus, d'autant qu'à proximité de chez moi, les hêtres, chênes et autres bouleaux sont légions... et qu'en ce moment, on ne manque pas de feuilles.

Lépiste blanchâtre (lepista glaucoma).
Il a l'aspect d'un pied bleu (lepista nuda) qui aurait perdu ses couleurs.
L'odeur des deux champignons est assez proche, mais celle du
blanchâtre a une touche légèrement mentholée tellement inhabituelle
parmi les champignons qu'on a du mal à l'identifier.
Je suis donc allé m'approvisionner en feuilles mortes en prélevant directement sur les branches quelques rescapées du vent d'automne, plutôt que de les prendre au sol où elles auraient commencé à se décomposer.

Coup de chance : bien que mon attention était plutôt tournée vers les cimes, mon regard s'est trouvé attiré par une constellation de champignons. Leur allure est typique des lépistes comme les pieds bleus (lépistes nus). Plus clairs (ce qui m'a permis de les repérer), couleur crème sur le dessus, bleu lilas délavé sur le dessous : il s'agit probablement de lépistes blanchâtre. Moins communs que leurs cousins tout bleus, ils partagent avec eux cette saveur des sous-bois si typique. Autant vous dire que je ne me suis pas fait prier pour les cueillir, d'autant que dans mon élan, j'ai pu aussi dénicher quelques poignées de chanterelles en tube. Une récolte vraiment inespérée pour un mois de décembre !

Mais revenons à nos moutons... ou plutôt à nos feuilles...

J'avais dans l'idée de préparer des filets de volaille, mais je ne savais vraiment pas quelle essence serait la plus adaptée. J'ai donc fait un premier test sur 3 petits morceaux tout d'abord cuits à la poêle. Au final, ce sont les feuilles de hêtre qui ont donné le meilleur résultat (assez nettement), suivies par celles du chêne et enfin celles du bouleau...

Feuilles de hêtre (fagus sylvatica).
Comparées à celles du chêne et du bouleau, ce sont elles qui ont donné le meilleur résultat.

Filets de volaille fumés aux feuilles de hêtre
et spaghettis forestiers

Ingrédient (pour 4) :
  • 600g de filets de volaille, coupés en lanières épaisses
  • 500g de champignons (dans mon cas, un mélange de chanterelles en tubes et de lépistes blanchâtres)
  • 400g de spaghettis
  • 20cl de crème entière
  • 15cl de vin blanc
  • 50g de beurre demi-sel
  • 2 cuillères à soupe d'huile
  • 1 gros oignon
  • 2 gousses d'ail
  • Quelques poignées de feuilles mortes de hêtre pas trop sèches
  • Sel et poivre
Préparation :
  • Nettoyer les champignons et émincer les plus gros
  • Faire fondre 25g de beurre au fond d'une poêle bien chaude
  • Lorsque celui-ci est bien mousseux, y placer l'oignon finement haché ainsi que les champignons
  • Laisser cuire à feu vif tout en remuant un minimum
  • Lorsque le liquide rendu a presque disparu, ajouter l'ail émincé et le vin blanc et laisser réduire à feu doux
  • Pendant ce temps, lancer la cuisson des spaghettis dans une grande quantité d'eau bouillante salée
  • Lancer également la cuisson des filets dans l'huile et le reste du beurre (le mélange avec l'huile évite au beurre de brûler) en les arrosant le plus souvent possible avec le fond de la poêle (évite qu'ils se dessèchent)
  • Une fois cuis, réserver les filets au chaud et jeter la matière grasse liquide
  • Déglacer avec un peu d'eau et verser le tout sur les champignons en cours de réduction
  • Ajouter également la crème, saler, poivrer et réduire le feu au minimum
  • Lorsque les spaghettis sont cuits, les égoutter, les verser dans les champignons et bien mélanger
  • Il n'y a plus qu'à fumer les filets comme expliqué ci-dessous avant de servir

Pour le fumage, rien de plus simple :  une poignée de feuilles compactée au fond d'un cul de poule avec une grille par dessus. Les morceaux de filet cuits au préalable sont placés de telle sorte qu'aucun ne soit directement au dessus des feuilles. L'allumage des feuilles est fait à l'aide d'un chalumeau culinaire, très pratique au travers de la grille (l'utilisation d'allumette peut donner un goût soufré). Aussitôt les feuilles enflammées, couvrir le tout en laissant un léger espace afin de limiter l'apport d'oxygène, ce qui aura pour effet d'étouffer les flammes sans pour autant éteindre la braise tout en produisant de la fumée. Laisser ainsi pendant environ une minute avant de servir. Le plus difficile, c'est finalement de trouver le bon compromis entre des feuilles ni trop sèches, ni trop humides...

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