lundi 24 février 2014

Le temps des salades est arrivé

Ça y est : l'allongement des jours est enfin perceptible. Avec lui, on commence à voir sortir de terre quelques petites de choses intéressantes...

Ici, les perce-neige (galanthus nivalis, non comestible) sont vraiment sortis en masse. A croire que les fortes précipitations de ce début d'année leur ont vraiment profité.

Alors que les perce-neige déploient déjà leur fleurs, de nombreuses rosettes font elles-aussi leur apparition. Et parmi elles, beaucoup sont comestibles. Il suffit donc de savoir les repérer.

En voici quelques unes des plus communes :

Sans aucun doute une des salades sauvages les plus connues : le pissenlit (taraxacum officinale).
Polymorphe, il compte de nombreuses sous-espèces très proches les unes des autres, mais toutes
sont comestibles. Malgré cette diversité, il reste l'une des plantes les plus faciles à identifier, même
avant l'apparition de ses fleurons jaune soleil. Son amertume en découragera pourtant plus d'un !

Méconnues en tant que salades, les jeunes pousses de primevères (primula veris et primula vulgaris
tout particulièrement) sont très aromatiques. Il vaut mieux d'ailleurs les utiliser dans un mesclun et
éviter d'en mettre trop, car sans cela, leur saveur légèrement piquante deviendrait vite écœurante.
Bien qu'il soit assez simple de reconnaître une rosette de primevères, en cas de doute, il vous
faudra attendre l'apparition des fleurs. Ces dernières ont d'ailleurs un petit goût sucré très agréable.

Autre plante à rosette : l'oseille (rumex acetosa). Quand on en trouve une belle comme ça, impossible
de passer à coté sans un petit prélèvement : son goût acidulé rajoute du peps à toutes les salades. Les
gourmands atteints de problèmes articulaires ou rénaux devront quant à eux l'éviter, ou au moins la
consommer avec beaucoup de modération à cause de l'acide oxalique qu'elle contient.
Attention : pour un œil non habitué, la forme en fer de lance des feuilles d'oseille peut être
source de confusion avec l'arum (toxique), dont les jeunes feuilles ont une forme assez proche.

Très commun, présent partout (même où n'en voudrait pas), le lamier pourpre (lamium purpureum) ne
pousse pas en rosette, mais il n'est pas dénué d'intérêt. Sa saveur "terreuse" (ou je sais, c'est pas très
attirant comme ça) rappelle un peu celle des pousses de betterave. Et surtout, ses sommités aux feuilles
et aux fleurs pourpres font de belles décorations comestibles.

Un petit aromate pour conclure : l'ail des champs (allium oleraceum).
Lorsque ses feuilles sont jeunes, on jurerait qu'il s'agit de ciboulette.
C'est d'ailleurs un produit de substitution plus qu'acceptable.
Son meilleurs atout pour l'identifier : son odeur... d'ail.

Il suffit alors de prélever quelques feuilles des uns et des autres, toutes issues d'endroits soigneusement sélectionnés (quelques conseils [ici] pour bien choisir son lieu de cueillette), de bien les laver à plusieurs eaux (dont de l'eau vinaigrée), de les agrémenter de fine tranches de magret de canard séché, de petits cubes de vieux comté, d'un filet d'huile de noix et de vinaigre de cidre...


... et on se régale !

Salade de pissenlit, primevères, oseille, lamier pourpre et ail des champs,
fines tranches de magret séché et vieux comté.

samedi 15 février 2014

Noir et blanc

Serpolet (thymus serpyllum).
Cousin du thym (thymus vulgaris), il a parfois un parfum
citronné qui fait merveille en infusion avec un peu de miel
de lavande.
Les billets se font rare en ce moment sur "Sauvagement-Bon". Malgré un hiver exceptionnellement doux, les salades sauvages hivernales sont plutôt timides (peut-être vraiment trop doux cet hiver) et les plantes printanières n'ont pas encore fait leur apparition (on va pas non plus être trop exigeant hein)...

Quoi qu'il en soit, comme chaque fois en cette saison, ce sont les réserves accumulées de l'année précédente qui me fournissent la matière dont j'ai besoin.

C'est tout d'abord le cas de plusieurs plantes aromatiques séchées telles le thym, le serpolet, la lavande, le calament, l'origan et la menthe que j'utilise presque tous les soirs en infusion avec du miel, de manière préventive contre les rhumes, bronchites et autres attaques hivernales... Et pour l'instant, je dois dire que ce traitement est plutôt efficace.

C'est aussi et surtout le cas des champignons pour lesquels j'ai encore pas mal de stock, et surtout de ma diversité. Ça me permet d'en caser assez fréquemment dans ma cuisine, selon mes envies...

Cèpes, bolets à pied rouge, chanterelles grises, maitake (polypore en touffe),
morilles, trompettes de la mort... il me manque juste des coulemelles que
malheureusement j'ai très peu trouvées l'année dernière (et qui pourtant
se sèchent très bien).

Que ce soit dans un plat de gibier mijoté, dans une terrine avec du foie gras ou dans une sauce à la crème pour accompagner une volaille, les différentes espèces que j'ai pu sécher permettent de varier les plaisirs. Et aujourd'hui, c'est pour un poisson que quelques unes de mes dernières trompettes de la mort se sont sacrifiées...

Filets de cabillaud en croûte de trompettes de la mort


Ingrédients (pour 4) :
  • 500g de filet de cabillaud
  • 30g de trompettes de la mort séchées
  • 2 oeufs
  • 30cl de bouillon de volaille clair
  • 5cl de vin blanc sec et léger (Sylvaner par exemple)
  • Farine
  • Beurre
  • Huile de tournesol
  • Sel et poivre
Préparation :
  • Passer les trompettes dans un moulin à café afin de les réduire en poudre
  • Mélanger cette poudre à sec avec 30g de farine, deux ou trois tours de moulin à poivre et quelques pincées de sel fin
  • Couper le cabillaud en pavés pas trop épais
  • Les rouler une première fois dans la poudre
  • Plonger ensuite rapidement dans les œufs préalablement battus en omelette, puis à nouveau dans la poudre, puis encore une fois dans les œufs et une dernière fois dans la poudre (le but est de constituer un nappage épais qui fera une belle croûte)
  • Placer ensuite les pavés dans une poêle sur feu vif, au fond de laquelle on aura fait fondre un peu de beurre avec de l'huile
  • Bien saisir les pavés de tous les côtés afin de fixer la croûte
  • Puis réduire le feu et terminer la cuisson
  • En parallèle, faire fondre une bonne noix de beurre dans une casserole
  • Ajouter le reste de mélange farine-champignon et le cuire façon roux blanc
  • Ajouter ensuite le bouillon et le vin blanc et battre immédiatement au fouet afin d'éviter la formation de grumeaux et obtenir une sauce épaisse et onctueuse
  • Servir les pavés avec cette sauce
  • Accompagner de pâtes, pommes de terres vapeur ou comme ici, de cerfeuil tubéreux juste rissolé
A noter que ça marche aussi très bien avec des filets de dorade ou de loup...

lundi 3 février 2014

C'est l'pied

Celles et ceux qui lisent régulièrement les lignes de ce blog savent que j'apprécie tout autant la montagne que le littoral. Or, en cette période hivernale, on ne pas dire que la montagne ait grand chose de sauvage à offrir pour se mettre sous la dent (ou alors, il faudrait se mettre à la chasse).
C'est donc sur la côte que je passe beaucoup de mon temps libre à la morte saison, à plus forte raison lors de grandes marées, comme ce fut le cas ce week-end.


Malheureusement, le beau temps n'a pas été pas au rendez-vous : malgré une température plutôt douce pour la période (entre 6 et 8°), le vent fort et les nombreuses averses n'incitaient pas à chausser ses bottes pour arpenter les rochers à marée basse. Pour couronner le tout, la forte houle poussée vers la côte par le vent du large annulait une partie des effets des grands coefficients...

... inversement, à marée haute, les effets se retrouvent amplifiés et les plus grosses
vagues en sont venues à envahir les bocages du bord de mer.

Surprise parmi les objets apportés par la marée : une bouée couverte d'anatifes (lepadomorpha).
Il ne faut pas les confondre avec les délicieux pousse-pieds (photo [ici]), qu'on trouve parfois
sur les rochers battus par les vagues.

Les bécasseaux de sanderling (calidris alba) eux aussi font le tour des plages, à la recherche
de quelques menus butins à picorer. Je suis certains qu'il auraient bien aimé tomber sur
les anatifes...
Pourtant, malgré les conditions, une fois sur place, on oublie tout : l'eau qui se retire exerce une sorte d'attraction, l'envie d'aller explorer ce qu'elle ne laisse apparaître que quelques jours dans l'année, l'espoir de dénicher un tourteau, voire un homard...

Cette fois-ci, à part quelques petites étrilles, aucun crustacé dans les tailles réglementaires n'a daigné se montrer. Heureusement, sous certains rochers, il y a aussi des coquillages...

Ormeau (haliotis tuberculata). Comme il pleuvait abondamment, je n'avais pas pris mon appareil photo
avec moi, cette photo est donc une ancienne, sortie des tiroirs pour illustrer le billet. On y voit nettement
les bords du pied-ventouse avec lequel ce gastéropode se colle aux rochers pour brouter les algues
à sa portée. De ce point de vue, il est très comparable aux patelles (chapeaux chinois).

Deux ormeaux, c'est finalement ce que j'aurai ramené après deux heures passées sous une douche glacée. Largement au dessus de la maille (9 cm mini, dans la limite de 12 par personne), je les ai bichonnés, d'autant que c'est un coquillage au pied très sensible (il est hémophile)... mais tellement bon !

L'aspect extérieur des coquilles des ormeaux, très discret, mimétique avec les rochers sur lesquels
il se colle, contraste énormément avec le brillant nacré de la face intérieure. On devine la forme
spiralée de la coquille, lui donnant l'aspect d'une oreille (d'où ses autres noms : oreille de Saint-Pierre
ou oreille de mer). Les trous régulièrement espacés lui servent à passer ses papilles sensitives.
Ceux-ci se déplacent au fur et à mesure que le mollusque grandit, les plus anciens étant
finalement comblées par la nacre.

Alors que la préparation traditionnelle consiste à les cuire dans un peu de beurre (éventuellement avec de l'ail) après les avoir "attendris" en les martelant fermement, je préfère de mon côté profiter de leur fraîcheur pour les déguster crus, en sashimis.


C'est à mon avis le seul moyen de pleinement profiter du véritable goût de ce coquillage exceptionnel, sans aucunement le dénaturer.
Pour les préparer, il faut commencer par séparer le pied de la coquille en glissant un couteau bien aiguisé le long de la coquille de son côté le plus fin (celui où aboutie la ligne de trous). On le débarrasse ensuite des entrailles (à conserver pour relever un fumet de poissons ou de crustacés). Au final, il ne reste que le muscle (qui constitue la majeure partie du mollusque) qu'il faut ensuite laver.


Comme c'est une chair au goût très fin, il ne faut pas l'accompagner avec une sauce trop forte.
Exit la sauce soja et le wasabi, remplacés par quelques fleurs de moutarde et des graines de
criste marine macérées au vinaigre.


On peut alors le découper immédiatement ou le laisser s'attendrir en l'oubliant une journée au réfrigérateur : dans tous les cas, pour conserver une belle texture, et contrairement aux préparations où les ormeaux sont cuits, on ne le bat pas.
Il ne reste plus qu'à le découper en fine lamelles. Il faut éviter d’abîmer la chair en la sciant avec plusieurs allers-retours et plutôt essayer de prélever chaque lamelle en n'effectuant qu'un seul passage de la lame à chaque fois. Il faut donc un couteau où elle est longue et surtout bien aiguisée.
L'orientation de la coupe a son importance car s'agissant d'un muscle, il vaut mieux éviter de couper dans le sens des fibres. De mon côté, je pose le pied à plat et découpe des lamelles d'environ 1 mm d'épaisseur à 45° par rapport à la verticale. Elles conservent une texture ferme sans pour autant être coriaces.
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