|
En arrière-plan, la Pierra Menta : un énorme monolithe de pierre dont l'origine est attribuée à Gargantua. Selon la légende, le géant aurait donné naissance à cette curiosité en donnant un coup de pied dans le massif des Aravis, détachant au passage un "petit" bout de roche pour le projeter quelques dizaines de kilomètres plus loin dans le Beaufortain (créant aussi pour l'occasion la porte des Aravis). |
Pour cette suite de mes pérégrinations savoyardes, nous allons partir de la limite des premiers névés pour ensuite redescendre un peu dans la vallée. Sur les versants nord, la limite de la neige se situait il y a 4 jours aux alentours de 1900m, mais je suis certain qu'elle est maintenant au dessus des 2000m.
|
À cette hauteur, la fonte de la neige donne naissance à des torrents de montagne qui apportent toute l'humidité nécessaire au développement de plantes, mais pas que... |
|
Un petit replat sur le trajet du torrent suffit à former un étang où les eaux plus calmes semblent avoir concentré les ébats amoureux de tous les batraciens du coin. Les eaux sont en tous cas couvertes de leurs œufs ! |
|
En bordure de ce même étang, les fleurs du grand pétasite (petasites hybridus) sont déjà bien sorties. Il partage avec le tussilage cette particularité de fleurir avant l'apparition de ses feuilles. D'ici l'été, ces dernières auront eu le temps de sortir et d'atteindre des tailles dépassant fréquemment 50cm. La plante n'est pas dénuée de toxicité (alcaloïdes pyrrolizidiniques), ce qui n'empêche pas certains de ses cousins d'être consommés en Asie (petasite japonicus). |
|
Non loin de là, dans un endroit un peu plus sec, le jaune des fleurs de gagée (genre gagea, espèce indéterminée) attire l'attention. Avec leur forme étoilée, elles se démarquent des autres fleurs jaunes alentours, principalement des trolles et de la populage. Les bulbes des gagées seraient comestibles, mais la plupart des espèces de ce genre sont protégées. |
|
Descendons un peu pour nous rapprocher des forêts d'épicéa en lisière desquelles le pétasite blanc (petasites albus) est en fleurs, mais cette fois-ci avec quelques feuilles,contrairement à son cousin rencontré auparavant. Si on descendait encore un peu, les feuilles auraient totalement recouvert le sol et les fleurs auraient déjà fructifié pour donner de nombreux akènes à aigrettes, s'envolant au gré du vent, un peu comme avec les pissenlits. |
|
Blanche aussi cette pulsatille des Alpes (pulsatilla alipina). Pour le plaisir des yeux uniquement, car comme la plupart des renonculacées, elle est toxique. |
|
Blanche encore cette grassette des Alpes (pinguicula alpina) dont la rosette en étoile est très caractéristique.
Mais il ne faut pas se fier aux apparences, cette délicate petite plante est une carnivore qui capture ses proies en les engluant sur ses feuilles ! Par ailleurs, sans être réellement comestibles, certaines grassettes ont autrefois été utilisées pour faire cailler le lait. |
|
A quelques dizaines de mètres de là, en jetant en œil rapide à cette touffe fleurie, on aurait pu croire à de la ficaire... mais que nenni ! Il s'agit en fait de violettes ! Car malgré leur nom, les violettes à deux fleurs (viola biflora) sont on ne peut plus jaunes... Feuilles et fleurs sont comestibles, comme pour la plupart des plantes du genre "viola". |
|
Et là, de quoi s'agit-il donc ? De loin, on pourrait croire à de jeune pissenlits, mais de près, la forme des feuilles rappelle les laiterons, et en y regardant d'encore plus près, la côte sur le dos des feuilles a une crête hérissée de poils, rappelant plus une laitue. D'ailleurs, si on en coupe un morceau, un latex blanc suinte de la blessure... mais cékoidon ? |
|
... et bien c'est de la laitue des Alpes (lactuca alpina, syn. cicerbita alpina), et puisqu'il y en a plein, c'est tout simplement elle que je vais cuisiner ! Mais attention, celle-ci est naturellement très amère : on ne peut donc pas la consommer de toutes les manières. |
Gratin de laitue des Alpes, diots et Beaufort
Ingrédients (pour 4, soit un petit plat à gratin) :
- Entre 20 et 30 jeunes pieds entiers de laitue des Alpes (coupés le plus bas possible)
- 2 diots fumés (saucisses typiquement savoyardes)
- 70g de Beaufort
- 25cl de vin blanc de Savoie (un Apremont par exemple)
- 15cl de lait entier
- 15-20g de beurre
- 15-20g de farine
|
C'est là qu'on se rend compte à quel point le Beaufort peut être gras ...
Mais c'est tellement bon ! |
Préparation :
- En préalable, laisser tremper la laitue des Alpes pendant un heure dans de l'eau froide
- Couper les diots en rondelles et les cuire 15 minutes dans le vin blanc à couvert, puis réserver d'un côté les rondelles, de l'autre le liquide de cuisson
- Plonger 5 bonnes minutes les pieds de laitue des Alpes dans de l'eau salée frémissante
- Puis bien les égoutter en les pressant pour en évacuer un maximum d'eau
- Les placer dans un petit plat à gratin beurré (en couches successives de 5 ou 6, chaque couche perpendiculaire à la précédente) en parsemant de rondelles de diots
- Faire une sauce béchamel avec la farine et le beurre, mais au lieu d'utiliser le lait comme seul liquide, utiliser un mélange fait de 15cl de lait et de 15cl du liquide de cuisson des diots
- Verser la sauce obtenue dans le plat à gratin de manière à napper la laitue et les diots
- Parsemer de Beaufort râpé
- Enfourner à 210°C le temps que le gratin se fasse
|
On retrouve dans ce plat une saveur très proche de celle des endives cuites, c'est à dire, tout à fait acceptable, et même très agréable ! On comprend pourquoi cette laitue est très appréciée dans les Alpes italiennes... |
j'aime beaucoup tous ces photos.
RépondreSupprimerc'est un excellent article.
merci pour le partage.