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jeudi 10 septembre 2015

Mal-aimés

Amanite fauve (amanita fulva).

Cette très proche parente de l'amanite vaginée partage avec elle pas mal de caractéristiques commune, dont la plus intéressante pour ce blog : elles sont toutes deux d'assez bonnes comestibles, pour peu qu'on prenne le temps de les cuire. En effet, quelques minutes à plus de 70°C suffisent à détruire les toxines thermolabiles qu'elles contiennent.

Autre soucis concernant cette mal-aimée : sa fragilité qui impose aux cueilleurs de leur aménager une place sur le haut du panier. Mais la récompense est là : une agréable saveur aux évocation terreuses, un peu comme la betterave, mais en plus subtile. Pour en profiter au mieux, une préparation en duxelles est idéale.

Pour la reconnaître(*): la marge striée du chapeau, sa couleur fauve généralement plus sombre au centre, un long pied élancé creux à la chair légèrement colorée, pas d'anneau, une grande volve et une allure globalement frêle.


Langue de boeuf (fistulina hepatica).

Ses formes souvent étranges, sa couleur rouge, la texture gélatineuse et sanguinolente de son chapeau par temps humide sont autant de caractéristiques qui la rendent repoussante, sans même parler de son nom de fistuline hépatique.

C'est pourtant l'un des rares champignons a pouvoir se consommer cru. La texture croquante de sa chair lorsqu'elle est jeune et l'aspect magnifique des fibres la composant en font un ingrédient de choix pour des salades surprenantes ou pour un improbable carpaccio. Cuite, on la cuisinera comme un morceau de viande.

Pour la reconnaître lorsqu'elle est jeune(*) : le dessus du chapeau est de couleur orangée à rouge brique ; il est couvert de petits points faisant penser à des papilles (comme sur une langue) ; le dessous est beige très clair, couvert de pores tellement serrés qu'on voit difficilement qu'il s'agit de pores ; le pied est excentré ; sa chair est fibreuse rouge clair (voire presque blanche parfois) mais elle rougit très vite en s'oxydant.
Lorsqu'elle est plus avancée(*) : le rouge du chapeau s'est assombri ; par temps humide, il prend une texture gélatineuse et laisse s'écouler des gouttes d'un liquide couleur sang ; au dessous, la présence de pores est plus évidente.


Bolet à pied rouge (boletus luridiformis ou boletus erythropus).

Ses problèmes : la couleur rouge de son pied et de ses pores (qui lui vaut souvent d'être pris pour un bolet satan par les néophytes) et le bleuissement intense de sa chair à la découpe (qui a tendance à inquiéter).

Toxique cru, une bonne cuisson le transforme en un excellent champignon. Sauté à la poêle comme un cèpe, il n'en égale malheureusement pas la saveur. Par contre, sa fermeté lui donne une tenue exceptionnelle dans les plats mijotés. Mon pêché mignon avec les plus petits spécimens: une préparation "à la grecque". Autre point intéressant : pour le conserver longtemps, il suffit de le couper cru en fines lamelles et de faire rapidement sécher celles-ci dans un endroit ventilé (ou avec un dessiccateur).

Pour mieux l'identifier(*) : Couleur généralement (mais pas systématiquement) sombre de son chapeau, couleur rouge du pied et des pores, absence de réseau sur le pied, bleuissement intense et rapide de sa chair jaune. Rarement véreux, il n'en est pas moins victime des limaces (comme le spécimen de la photo). A noter que généralement, la chair garde sa couleur jaune aux endroits dévorés par les limaces (pas ou presque pas de bleuissement).


Bolet blafard (boletus luridus ou suillellus luridus).

Il a une mauvaise réputation très comparable à son cousin le bolet à pied rouge et comme lui est toxique cru. Certaines références (Schweiz Med Wochenschr. 21/08/1982 par exemple) lui attribuent aussi une toxicité similaire à l'effet "antabuse" provoqué par certaines espèces de coprins. Personnellement, malgré les nombreux spécimens consommés depuis des années (parfois avec du vin), je n'y ai jamais été confronté.

Le couper en lamelles pas trop épaisses (il doit être cuit à cœur), bien les griller à la poêle dans un mélange huile-beurre, ajouter un peu d'ail et de persil hachés juste à la fin : il se rapprochera en qualité et en goût des meilleurs cèpes.

Principales caractéristiques(*) : Un chapeau brun plutôt clair et à l'aspect velouté, des pores rouges, un pied trapu couvert d'un réseau rouge/jaune, une chair jaune bleuissante sont autant de caractéristiques qui permettent de se faire une bonne idée sur son identité.


Amanite rougissante (amanita rubescens), amanite vineuse ou encore golmotte.

Elle, son principal problème, c'est sa ressemblance avec l'amanite panthère, extrêmement toxique. Pourtant, l’œil avisé sait les distinguer sans trop de soucis.

Cuite au moins une dizaine de minutes à plus de 70°C pour en éliminer les substances toxiques, elle devient réellement un excellent champignon. Le meilleur moyen : plonger les champignons entiers pendant cette durée dans de l'eau bouillante. Malgré ce traitement de choc, la golmotte ne perd rien en goût et conserve une très bonne tenue. A partir le là, tout lui est permis. Une suggestion : au four, coupées en petits morceaux avec sauce béchamel, œuf et emmental entre deux feuilles de pâte brisée, pour une tourte à tomber !

Pour la reconnaître(*) : chapeau rosé à brun couvert de "taches" couleur crème assez serrées sur les jeunes spécimens (elles ont tendance à disparaître avec l'age), anneau généralement strié sur sa partie en liaison avec le pied, chair blanc-rose prenant une teinte vineuse au niveau des blessures, teinte encore plus prononcée vers la base bulbeuse du pied, où se trouve une volve peu marquée voire absente, pied assez massif.


Maintenant, pour ce qui est de vraiment les préparer... voici deux suggestions :

Duxelles d'amanites fauves, pour accompagner une côte de bœuf (par exemple).

Préparation:
  • Laver délicatement les amanites et bien les égoutter.
  • Placer une bonne quantité de beurre dans une poêle chaude.
  • Y faire fondre une échalote finement hachée sans la colorer.
  • Hacher finement les amanites au couteau et les ajouter dans la poêle.
  • Laisser cuire pendant 5 bonnes minutes en remuant régulièrement.
  • Rajouter un peu d'eau si le mélange devient trop sec.
  • Saler, poivrer, c'est prêt !



Brunoise de langue de boeuf et céleri, pour accompagner du hareng fumé.

Préparation:
  • Peler la langue de boeuf et bien la laver.
  • Réserver un morceau du pied (la partie la plus ferme) et réduire le reste en brunoise.
  • Réduire en brunoise moitié moins de chair de céleri rave cru.
  • Mélanger les deux brunoises, les saler, les poivrer et ajouter quelques gouttes de jus de citron et un filet d'huile de noisette.
  • Couper en lamelles le reste du pied mis de côté ainsi que les filets de hareng.
  • Dresser et accompagner de crème épaisse légèrement moutardée et poivrée.


(*) : Les descriptions données ici le sont à titre indicatif et ne peuvent en aucun cas être utilisées seules pour identifier de manière certaine un champignon. La consultation d'ouvrages de référence et un minimum d'expérience sont plus que nécessaires. En cas de doute, toujours privilégier la sécurité et ne pas consommer.

1 commentaire:

  1. Je me disais ce matin "ah, si Nicolas était là, je suis sûre qu'il identifierait comme très bons certains des champignons..." que j'ai donc laissé sur place avec quelques doutes, dont l'amanite fauve dont tu parles ! En revanche, les rougissantes, que j'adore de longue date, ont atterri sans complexe dans le panier, à côté de... magnifiques cèpes : presque trois kilos, youpi, même pas attaquées de l'intérieur, alors que je partais seulement en reconnaissance sans espoir de trouver quoi que ce soit !

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