jeudi 26 avril 2018

Deux cousines pour un poisson

Les deux cousines du titre de cette article sont membres d'une grande famille dans laquelle on compte bon nombre d'excellentes comestibles... mais aussi de funestes toxiques : les apiacées.

Point commun à toute cette cousinade, les inflorescences en ombelle qui ont valu pendant longtemps le nom d'ombellifères à la famille. A défaut de permettre l'identification d'une espèce, ce type d'inflorescence donne déjà une direction. Mais attention car une erreur, même au sein de la famille, pourrait être regrettable : entre carotte et ciguë, entre fenouil et férule, entre persil et l’œnanthe, ou encore entre grande berce et berce du Caucase, les premières vous titilleront les papilles alors que dans le meilleurs des cas, les secondes vous dérangeront l'estomac.

Et puis il y a ombelle et ombelle, certaines sont évidentes, d'autres le sont beaucoup moins. La preuve avec ces quelques exemples très variés, tous cousins et cousines, ou presque...

Egopode (aegopodium podagraria), comestible.

Berce sphondyle (heracleum sphondylum), comesible.

Grande astrance (astrantia major), non comestible, TOXIQUE selon certaines références.

Oenanthe safranée (oenanthe crocata), TOXIQUE.

Panicaut maritime (eryngium maritimum), comestible (mais attention aux piquants !).
Espèce protégée.

Sanicle d'Europe (sanicula europaea), non comestible.

Ache nodiflore ou ache faux cresson (helosciadium nodiflorum syn. apium nodiflorum), comestible.

Criste marine (crithmum maritimum), comestible.

Carotte (daucus carota), comestible.

Fenouil commun (foeniculum vulgare), comestible.

Et puis dans les plantes à ombelles, il y a aussi des faux amis, comme par exemple :

Ail victorial (alium victorialis), famille des liliacées, comestible.
L'inflorescence aussi est une ombelle, mais une ombelle simple, contrairement à
la plupart des apiacées qui ont des ombelles d'ombellules. A noter en bas à gauche
l'ombelle d'une noix de terre (conopodium majus), qui elle est bien une apiacée.

Sureau noir (sambucus nigra), famille des adoxacées,comestible (selon préparation).
Cette fois-ci, bien que les fleurs soient dans le même plan, l’inflorescence n'est pas une
ombelle mais un corymbe (les ramifications sont successives plutôt que de toutes
se retrouver sur un même nœud).

Mais revenons à la recette du jour, un ceviche. C'est habituellement une apiacée qu'on utilise en aromate dans cette préparation : la coriandre. Plutôt rare à l'état sauvage en France (quelques échappées de jardins), c'est donc avec deux de ses cousines, très aromatiques elles-aussi, que j'ai voulu la remplacer :

Le fenouil, avec son arôme anisé...
 Fenouil commun (foeniculum vulgare)
Et la berce, aux arômes mêlés de coco et de mandarine...
Grande berce, berce sphondyle ou branc ursine (heracleum sphondylum)

Quant à la recette, elle est plutôt simple :

Ceviche de mulet, berce et fenouil

Ingrédients (entrée pour 4) :
  • Un mulet de 600g
  • 200g de pétioles de jeunes feuilles de berce (comme celles de la photo), pelés (peau et poils)
  • 1 beau plumeau de fenouil
  • 2 citrons verts non traités
  • Fleur de sel
  • Poivre blanc
  • En option: 1 petite échalote, un piment d’Espelette frais
Préparation:
  • L'avant-veille, lever les filets du mulet et les placer au congélateur (ce traitement a pour but d'éliminer les éventuels parasites que pourrait avoir le poisson)
  • Le jour du service, laisser les filets se décongeler à température ambiante
  • Les découper en petits cubes de 3 à 5 mm de côté
  • Les mettre à mariner dans le jus des citrons pendant au moins 30 minutes au réfrigérateur
  • 5 minutes avant de servir, découper les pétioles de berce en brunoise et ciseler le fenouil
  • Égoutter le poisson avant d'y incorporer la berce et le fenouil (et en option, l’échalote et le piment finement hachés)
  • Dresser en finissant avec une pincée de fleur de sel, de poivre et juste un peu de zeste de citron vert rappé très fin
Ceviche de mulet, berce et fenouil

mercredi 18 avril 2018

Verdure

C'est parfois (souvent ?) avec les recettes les plus simples qu'on profite le mieux des plantes sauvages. En ce qui concerne celles dont on utilise la verdure, il est une préparation qui fait merveille avec presque toutes, et c'est encore en Asie qu'il faut aller la chercher, cette fois-ci au Japon.

Le principe de base :
  • On blanchit la verdure : on l'ébouillante quelques minutes dans de l'eau salée avant de les égoutter puis de les plonger immédiatement dans de l'eau glacée. Ça stoppe immédiatement la cuisson et ça permet aussi de garder un beau vert bien appétissant.
  • On égoutte bien, voire on presse pour évacuer autant d'eau que possible.
  • On dresse dans l'assiette puis on arrose d'un peu de sauce soja sucrée et d'un filet d'huile de sésame.
  • On finit juste par quelques pincées de graines de sésame blanc.
Et c'est tout !

Pour cette fois-ci, je me suis concentré sur 3 plantes de saison :

Déjà vues avec l'article précédent ([ici]): Les marguerites (leucanthemum vulgare). Le fait de les blanchir un bonne minute (pas plus) va atténuer leur puissance aromatique. C'est donc la manière idéale de les préparer pour celles et ceux qui les trouvent trop fortes crues, en salade.

Le colza (brassica napus), du genre botanique des choux (brassica), on retrouve sans ambiguïté cette parenté dans son goût. Il faut à tout prix éviter les cultures qui utilisent généralement de nombreux produits phytosanitaires et se concentrer sur les spécimens naturalisés, qui ne sont pas trop rares dans les régions où la plante est cultivée. Il suffit d'observer les bords de route (déconseillés pour la cueillette) pour s'en rendre compte. Les sommités encore en bouton sont les meilleures ; encore meilleures lorsque la tige est bien charnue et qu'elle casse net. Avant de les blanchir (3 minutes, vinaigrer un peu l'eau si vous trouvez le colza trop amer), il vaut mieux peler la partie charnue des tiges, coriace et fibreuse.

Houblon (humulus lupulus). Cette liane fréquente les coins plutôt humides et buissonnants. Au printemps, ses pousses partent à l'assaut des hauteurs en s'enroulant autour de tous les supports qu'elles trouvent sur leur chemin, y compris des congénères. Il en résulte parfois de véritables torsades où une dizaine de lianes peuvent se retrouver entremêlées. Ses poils courts et rêches lui confèrent un toucher rugueux, y compris sur ses feuilles dont la forme rappelle exactement celles de la vigne. Ce sont les jeunes extrémités que l'on cueille (les 20 derniers centimètres). En les blanchissant 3 minutes, le côté rugueux est atténué et ne pose aucun problème à la dégustation, tout en conservant un peu de croquant.

Et voilà ce que ça donne :
A gauche, la marguerite, au centre, le colza, et à droite, le houblon.
Tous sont excellents avec des saveurs très différentes, mais impossible de dire lequel des 3 je préfère !

samedi 14 avril 2018

Marguerite

Avez-vous déjà croqué dans les feuilles d'une marguerite ?
Très aromatiques et légèrement sucrées : leur goût fait merveille dans les salades.
Jeune rosette de marguerite (leucanthemum vulgare)
Mais ces feuilles-là peuvent avoir un autre usage et c'est encore une fois en Asie que je suis allé cherché l'inspiration, aidé par un ami lui aussi blogueur (son blog [ici]) auquel j'ai fait découvrir la plante récemment.
Les marguerites (leucanthemum vulgare) commencent à monter, il ne faut donc pas tarder car plus le temps avance, plus la plante est coriace.
Les amateurs de cuisine asiatique retrouverons en effet dans les feuilles de marguerite un peu du "Tong Ho" chinois ou du "Shungiku" japonais ou chrysanthème couronné en Français (glebionis coronaria), d'où la recette qui suit...

Soupe aux feuilles de marguerites et boulettes de poisson


Ingrédients (pour 4) :
  • 2 bonnes poignées de jeunes feuilles de marguerites
  • La carcasse et les chutes d'un assez gros poisson à chair blanche (dont ont aura prélevé les filets pour une autre préparation)
  • Ciboulette
  • Sauce de poisson
Préparation :
  • Récupérer un maximum des chairs de la carcasse (ne pas oublier les joues) pour en obtenir au moins 200g (en prélever sur les filets si pas assez)
  • Plonger le reste de la carcasse dans une casserole avec 1,5l d'eau bouillante
  • Couvrir et maintenir à frémissement pendant une bonne demi heure
  • Pendant ce temps, passer les chairs au hachoir électrique jusqu'à obtenir une pâte fine (les plus exigeants passerons l'appareil au tamis pour encore plus de finesse)
  • Y incorporer ensuite 6 brins de ciboulette finement hachés et une pincée de sel
  • Former 12 boulettes avec cet appareil
  • Filtrer le bouillon de poisson et le replacer dans la casserole
  • Amener le liquide à ébullition pour y plonger délicatement les boulettes
  • Après 3 bonnes minutes de cuisson, ajouter  une cuillère à soupe de sauce de poisson et les feuilles de marguerite, préalablement lavées, égouttées, débarrassées des tiges coriaces
  • Couper le feu rapidement et servir en saupoudrant de ciboulette hachée
Marguerite et poisson : un accord inattendu mais qui "match" parfaitement !
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