dimanche 26 octobre 2014

Retour aux fondamentaux...

... avec LE classique des classiques : l'ortie.

On pourrait croire qu'il n'est plus besoin de la présenter, mais l'ortie (urtica urens, pour celle de la photo) possède bien des facettes dont on ne connait en général que les mauvaises. C'est pourtant une plante aux nombreuses vertus, dont celles qui m'intéressent tout particulièrement : les vertus culinaires.
C'est tout d'abord une plante très nourrissante dont la teneur en protéines est élevée (7% de la plante fraîche, ou 30% de la masse sèche). D'un point de vue plus qualitatif, on y retrouve toutes les protéines nécessaires à l'homme. Et puis c'est quand même une plante tellement fréquente qu'on en trouve presque partout, pourvu que le sol soit suffisamment riche (les orties apprécient tout particulièrement les nitrates). Enfin, et c'est là qu'elle m'intéresse le plus : elle possède son propre goût, suffisamment caractéristique pour qu'on puisse le reconnaître dans un plat.
La période actuelle n'est généralement pas la meilleure pour sa récolte. Mais entre des fauchages effectués en septembre, quelques belles averses combinées à des températures exceptionnellement douces, une multitude de jeunes pousses sortent à nouveau de terre, comme au printemps : on aurait tort de ne pas en profiter...

Petits flans aux orties


Pour 5 flans (moules à tartelettes) : 125g d'orties, 50g de poivron rouge, 1 oignon, 3 œufs, 20cl de lait entier, huile d'olive.

Faire suer l'oignon finement haché dans un peu d'huile d'olive, ajouter ensuite les feuilles d'orties, elles aussi hachées. Les laisser étuver 5 minutes sur feu doux à couvert et mouiller légèrement si cela devient trop sec. Ajouter ensuite le poivron émincé en fines lanières. Poursuivre la cuisson 5 minutes encore, retirer du feu et laisser refroidir. Pendant ce temps, battre les œufs avec le lait, saler et poivrer. Incorporer les orties cuites et mélanger. Verser le tout dans les moules à tartelette préalablement beurrés et cuire au bain-marie dans un four à 150°C pendant une quarantaine de minutes (pour le bain-marie, utiliser une lèchefrite avec un peu d'eau au fond, à compléter régulièrement au fur et à mesure de son évaporation).

J'oubliais : si vous n'avez jamais cueilli d'orties, seules les plus jeunes feuilles (celles du sommet) doivent être cueillies. Plus elles vieillissent, plus elles deviennent fibreuses. En général, je me contente de ne prélever que les 3 ou 4 dernières paires. En les prenant par le dessous avec un mouvement montant, on échappe à 99% des piqûres. Et si vous avez trop peur de vous lancer : un simple sac plastique utilisé comme un gant suffit à vous protéger la main... Quoi qu'il en soit, une fois les feuilles cuites, plus aucune piqûre à craindre !

samedi 25 octobre 2014

L'automne s'installe

A peine revenu d'un voyage professionnel de deux semaines à New York (d'où le peu d'activité ces derniers temps sur le blog), me voilà de nouveau dans les bois... en France. Il faut dire que ce voyage décidé à la toute dernière minute m'a un peu frustré.
Entre des journées de travail très longues (encore plus longues avec l'effet du "jetlag") et un court week-end passé sur place au pas de course entre Manhattan le samedi et Montauk le dimanche : je n'ai même pas eu le temps de flâner pour découvrir quelles richesses les forêts et le littoral de Long-Island pouvaient bien cacher.
Entre Times-Square à gauche, sur Manhattan, et Montauk point à droite, c'est Long-Island qui s'étire d'ouest en est sur environ une centaines de miles. L'île est très densément habitée à proximité de New-York, mais à son autre extrémité, elle compte encore quelques belles zones boisées et un littoral assez épargné.
Les quelques cueilleurs que j'ai rapidement aperçus en bordure d'un bois dans les Hamptons n'ont fait qu'ajouter à cette frustration, d'autant que les champignons qu'ils ramassaient ressemblaient à de belles amanites des Césars, quoi qu'un peu plus clairs...

Et donc : aussitôt arrivé, aussitôt en forêt ! Aucune amanite des Césars dans le panier, mais quelques belles trouvailles tout de même...

Une belle série de jeunes et petits bolets du genre "leccinum". Mais il ne s'agit pas de bolets rudes (leccinum scabrum) car la chair blanche de ces spécimens vire au bleu à la coupe, ce qui n'est pas le cas avec le bolet rude. Au final, difficile d'affirmer à quelle espèce ils appartiennent précisément, mais l'avantage avec le genre "leccinum", c'est qu'aucun n'est toxique. Ils sont par contre de qualités gustatives très diverses !

Les incontournables cèpes de Bordeaux (boletus edulis) ont commencé une timide sortie...

Quant au polypore en touffe (grifola frondosa), cette année, je n'arrête pas d'en trouver. Ici, ce n'est qu'une petite moitié d'un spécimen faisant presque 5kg entier. Heureusement que je n'étais pas seul : on a pu le partager !

Je me régalais d'avance en les apercevant de loin, croyant qu'il s'agissait de coprins chevelus (coprinus comatus), mais de plus près, la teinte bicolore du chapeau ne laisse aucun doute, il s'agit de leurs cousins les coprins pie (coprinus picacea), non comestibles. Au passage, je rappelle que chez les coprins, il faut tout particulièrement se méfier du coprin noir d'encre (coprinopsis atramentaria), dont la forte teneur en coprine associée à l’absorption d'alcool est à l'origine du syndrome coprinien (effet antabuse).

Haute d'une trentaine de centimètres, j'espère que cette jeune coulemelle plutôt isolée (ici, macrolepiota procera, ou lépiote élevée) annonce l'arrivée de ses copines ! Sa grande taille est d'ailleurs le principal critère qui permet de la distinguer des principales lépiotes toxiques, souvent beaucoup plus petites.

Ces deux langues de bœuf (fistulina hepatica) ont bien profité de l'humidité ambiante : Le dessus de leur chapeau est comme gélifié. Un rapide coup d’œil à la couleur de leurs pores, au dessous, permet d'avoir une idée de l'age du champignon : en gros, si ceux-ci ont gardé une couleur très claire, le champignon peut encore être cueilli. Celle-ci, par exemple, est limite.
En cuisine, un reste de foie gras et un morceau de mozzarella m'ont donné l'idée d'une tarte...

Pour un moule à tarte de 28-30cm : 600g de polypore en touffe, 150g de foie gras, 3 œufs, 20cl de lait, 125g de mozzarella, un oignon et de la pâte brisée. Étaler la pâte au fond d'un moule à tarte. Débiter le polypore en morceaux d'un à deux centimètres, le foie gras en petits cubes et verser le tout sur le fond avec l'oignon préalablement haché. Recouvrir avec la mozzarella débitée en bâtonnets. Battre les œufs avec le lait, saler et poivrer généreusement et verser dans la tarte. Enfourner pour 45 minutes à 180°C. A déguster froid : la tenue est meilleure et les goût sont plus équilibrées.
La saveur toute particulière du polypore est vraiment en accord avec le foie gras : on croirait qu'ils ont été faits l'un pour l'autre !

A défaut de polypore en touffe, on peut utiliser des cèpes, des bolets rudes ou des lépiotes, mais eux auront besoin d'être cuits au préalable pour leur faire perdre de l'eau et concentrer leurs saveurs. Il faudra alors plutôt compter sur 800g de champignons frais.

mardi 7 octobre 2014

Tirer la langue

Promenons-nous dans les bois....






... et régalons nous avec ce superbe champignon !

Juste pelé, découpé cru en fines lamelles, servi avec de la pomme ou comme ici de la poire,
elles aussi en lamelles. Un filet de vieux vinaigre balsamique, une pincée de fleur de sel et
on se régale !

Pour ceux qui ne connaissent pas cet étrange champignon, il s'agit d'une langue de bœuf, autrement appelée fistuline hépatique (fistulina hepatica). Elle fait partie des quelques espèces à pouvoir être consommées crues.

Très polymorphe, comme le montre une simple recherche sur Google, voici quelques indications pour vous permettre de la reconnaître si vous la rencontrez (mais attention, merci de jeter un œil [ici]).

La langue de bœuf pousse généralement à la base des chênes ou des châtaigniers alors qu'ils sont encore vivants, mais se trouve parfois sur les souches encore en terre de ces arbres. Lorsqu'elle commence à sortir, elle se présente souvent comme une simple petite boule orangée. En grandissant, la couleur de son chapeau s'assombrit et passe au rouge brique. Alors que sur la face inférieure apparaissent rapidement des pores de couleur crème, la face supérieure se couvre d'aspérités ressemblant aux papilles qu'on trouverait sur une langue (d'où le nom de "langue de bœuf"). Le chapeau s'étale petit à petit, souvent de manière excentrée par rapport à son pied pour prendre l'aspect d'une raquette. Il lui arrive aussi de croître en formant plusieurs lobe, donnant au champignon un aspect difficilement définissable.
A l'apogée de sa croissance, le chapeau peut atteindre des tailles conséquentes (plus d'une trentaine de centimètres). Et c'est alors le début de la fin : La face supérieure a tendance à fixer l'humidité et prend un aspect gélatineux, sanguinolent et dégoulinant (d'où l'analogie avec un foie et son nom de "fistuline hépatique"). Selon le temps, elle finit par sécher et brunir (temps sec) ou par se déliter (temps humide).

Crue, la jeune langue de bœuf a une saveur plutôt boisée et étonnement acidulée. A la découpe, elle a en plus un aspect veiné du plus bel effet : c'est définitivement comme ça que je la préfère.
Mais elle peut aussi être consommée cuite et dans ce cas, je vous conseille de la tester en tranches épaisses, légèrement huilées et grillées à la façon d'un steak.

Une dernière remarque quand-même :
Son aspect et surtout sa saveur particulière font que la fistuline n'est pas appréciée de la même manière par tout le monde. Mieux vaut donc prévoir un plan B si vous comptez en servir...

J'oubliais aussi, pour les plus curieux : la grenouille est probablement une grenouille agile (rana dalmatina) ou grenouille pisseuse (ça ne s'invente pas), quant à l'araignée, il s'agit de la très commune épeire diadème (araneus diadematus).
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