samedi 28 février 2009

Anticonformiste

L'anticonformiste, ce n'est pas moi (enfin je crois)... Et pourtant, c’est parfois l’impression que me donnent les spectateurs involontaires de mes cueillettes : moi agenouillé essayant tant bien que mal de sortir de terre une racine de panais sans la casser, eux (en général quelques promeneurs) regardant intrigués un hurluberlu qui gratte le sol pour en sortir quoi au fait ?
 - Maman, qu’est-ce qu’il fait le monsieur ?
 - Il ramasse des champignons !
C’est une explication que j’entends assez souvent, même hors saison. C’est étrange comme le ramassage des champignons est encore bien ancré culturellement alors que la cueillette des plantes est complètement tombée en désuétude. C’est bien dommage car c’est passer à côté de véritables trésors.

Tussilage

C’est par exemple le cas de mon anticonformiste du jour : le tussilage, également nommé « pas d’âne ». Je viens d’en trouver les premières fleurs de l’année. Des centaines de soleils miniatures que les néophytes pourraient prendre de loin pour des pissenlits. Mais à y regarder de plus près, à part une courte tige écailleuse sous chaque fleur, il n’y a aucune rosette ni même aucune feuille. Et c’est bien là l’étrangeté de cette plante. A l’inverse des autres, elle fleurit d’abord, et ce n’est qu’une fois les fleurs passées qu’elle développe ses feuilles. Car du tussilage, on ne voit jamais les fleurs et les feuilles en même temps !

Les unes comme les autres sont utilisables en cuisines. On retrouve la même saveur dans les deux, mais celle des fleurs me parait plus fine. On peut les utiliser crues pour parfumer et décorer une salade. C’est assez difficile d’en décrire le goût, mais je pense qu’en parlant d’une fine saveur de résine, ça donne une idée de ce à quoi s’attendre. On peut aussi les cuire comme je l’ai fait aujourd’hui...

Tussilage

Dans plusieurs de mes bouquins, il était question de les faire revenir à la poêle dans du beurre ou de l’huile d’olive. Mais à moins de faire une véritable razzia, les fleurs de tussilage ne permettent pas à elles seuls de faire un plat consistant. Pour accompagner une entrecôte, j’ai donc complété avec une simple purée maison. Pour la cuisson, les fleurs (avec un ou deux centimètres de tige) ont juste fait un passage express au fond de la poêle dans un mélange de beurre et d’huile d’olive.

Tussilage, purée et entrecôte

Pour que la saveur résineuse du tussilage ne soit pas masquée par la grillade, il en faut quand même pas mal (je dirais une trentaine de fleurs par personne). Mais le résultat vaut la peine de la cueillette !

Dernière petite chose : la racine latine de « tussilage » signifie « qui chasse la toux », une de ses vertus médicinales. Son autre nom : « pas d’âne », lui vient paraît-il de la forme de ses feuilles. Pour la même raison, les celtes l’appelaient « calliomarcos », ce qui signifie « sabot de cheval ». Personnellement, je ne trouve la ressemblance que très lointaine.

samedi 21 février 2009

Ressources souterraines

Si pendant l’hiver il ne se passe pas grand-chose au dessus du sol, ce n’est pas le cas sous terre. Les plantes profitent de cette période pour accumuler dans leurs racines les réserves nécessaires à leur future croissance. C’est la période idéale pour les déterrer. Il ne faut pas trop attendre car lorsque ces plantes développent leur partie aérienne, elles puisent dans leurs réserves, leurs racines durcissent et deviennent ligneuses.

Feuilles de panais sauvage

Lorsque la hampe florale n’est pas encore développée, le principal problème du cueilleur est d’identifier les plantes en se basant uniquement sur quelques feuilles. De ce point de vue, des plantes comme les carottes présentent des risques du fait de la ressemblance de leurs feuilles avec celles de la cigüe. Contrairement aux carottes cultivées, leurs cousines sauvages sont généralement blanches. C’est également le cas des racines du panais, un cousin encore plus lointain. Ses feuilles ont l’avantage de présenter moins de risques de confusion avec d’autres ombellifères.

Restes des ombelles de panais de l'an dernier

Celui que j’ai utilisé aujourd’hui, je l’ai déterré au milieu des vestiges des ombelles de l’an dernier. J’avais repéré le coin lorsqu’elles étaient encore en fleurs. Le panais a en effet tendance à être envahissant et lorsqu'il est en fleur, on le repère très facilement.

Racines de panais sauvage

Une fois dans l’assiette, la version sauvage du panais est gustativement très proche de la version cultivée. Elle diffère essentiellement par sa taille et sa consistance. Sa saveur anisée parfume délicieusement soupes et potées et accompagne à merveille les volailles.

Dés de poulet au riz complet et panais sautés

Ingrédients (pour 4) :

  • 400g de blancs de poulet
  • 250g de panais (racines)
  • 200g de riz complet
  • 1 gros oignon doux
  • 1 cuillère à soupe de sucre
  • 1 cuillère à soupe de sauce soja
  • Huile de tournesol
  • Beurre
  • Sel et poivre
Dés de poulet au riz complet et panais sautés

Préparation :

  • Cuire le riz à l’eau et le réserver
  • Dans un wok bien chaud, verser un fond d’huile et faire revenir l’oignon préalablement haché grossièrement, puis réserver
  • Bien nettoyer les racines puis les gratter pour enlever la peau
  • Découper le poulet en dés de 2cm et le panais en morceaux ne dépassant pas 1cm
  • Nettoyer rapidement le wok, rajouter un peu d’huile et de beurre puis faire dorer le poulet et le panais
  • Ajouter le sucre au bout de 2 minutes et continuer la cuisson (remuer régulièrement)
  • Lorsque ça commence à se colorer, rajouter le riz, l’oignon, et la sauce soja
  • Tout en remuant, continuer de cuire pendant 3 à 4 minutes
  • Poivrer et si nécessaire, ajouter un peu de sel (la sauce soja est déjà très salée)

Attention : il existe une espèce de panais urticante (présence de furanocoumarines) qui peut provoquer des brulures par simple contact chez les personnes sensibles.

dimanche 15 février 2009

Doux ou salé ? Doux ET salé !

Samedi, c'était Normandie : une balade d’une journée le long des sentiers boueux, entre bocages et forêts. Sur quelques talus, des petites rosettes de feuilles arrondies d’un vert tendre : de la doucette, ou encore de la mâche.

Doucette ou mâche sauvage, accompagnée de quelques toutes jeunes pousses de cardamine et de stellaire

Pas ou peu de différence avec celle qu’on trouve au marché : ça tient essentiellement de la taille. Malheureusement, les endroits où elle poussait n’étaient pas tous propices à la cueillette et les quelques exemplaires récoltés ne suffisaient pas à remplir une assiette. ObioneQu’à cela ne tienne, on complètera avec celle « de culture » qui attend au réfrigérateur.

Un petit détour en baie de Somme en bordure des près salés (marée haute oblige) avant de repartir. Il n’y avait plus de trace de salicorne hormis quelques branches rabougries qui en étaient peut-être il y a encore quelques mois. Les quelques restes de bette maritime qu’on pouvait trouver étaient inexploitables. Mais l’obione est encore là, omniprésente. Ses feuilles argentées recouvrent en totalité d’immenses surfaces. La dernière fois que j’en avais vu, c’était en novembre et je n’avais appris qu’elle était comestible qu’une fois de retour à la maison. Alors cette fois-ci, même si ce n’est pas la saison (en principe, on la récolte au printemps lorsque les feuilles sont plus tendres), j’en ai ramené quelques sommités sélectionnées avec soin, histoire de faire connaissance.

Bien que ce soit une récolte carrément « hors saison », les feuilles sont relativement charnues. Ce n’est pas le cas des tiges qui sont trop ligneuses pour être conservées. Mais bien que charnues, les feuilles n’en sont pas moins fermes et c’est avec une petite plongée d’une minute dans de l’eau bouillante et un refroidissement immédiat que je les ai attendries. La quantité était suffisante pour pouvoir l’intégrer à une salade principalement composée de doucette. Un peu de "ciboulette" (ail des champs) récoltée elle aussi pendant la balade, finement hachée pour que les parfums diffusent plus. Quelques larmes de jus de citron vert, un filet d’huile neutre (colza, pépins de raisin), un peu de poivre et très peu de sel (l’obione est déjà bien salée), et la salade est prête.

Salade de doucette, obione et ciboulette

Gustativement, l’obione est à mi-chemin entre l’épinard et l’oseille avec le goût salé et iodé caractéristique des plantes de près salés. Pour ceux qui ont la chance d’habiter sur le littoral, c’est vraiment une plante à connaitre.

mardi 10 février 2009

Une envie de douceur

Gâteau crémeux au potiron

C'est en lisant un article de Shoko ("Gâteau crémeux au potiron"), une blogueuse japonaise et francophone, que cette envie m'a pris. L'utilisation du potiron comme ingrédient de base d'un dessert aussi doux est assez inhabituelle pour l'occidental que je suis, mais pas totalement inconnue... Ceux à qui il arrive de faire leurs emplettes dans des épiceries asiatiques ont certainement déjà eu l'occasion de voir des pâtisseries à la citrouille, et peut-être même d'y gouter. Personnellement, elles ne m'ont jamais réellement transporté mais dans le cas de l'article publié par Shoko, la photo était tellement appétissante que je me suis dit qu'il fallait absolument tester.

Comme à mon habitude, difficile de suivre la recette à la lettre. Le "potiron" que j'ai utilisé est d'une variété dont je ne connais pas le nom mais qui a une chair très ferme et assez douce. Pas de raisin sec dans mes réserves, mais un peu de rhum et plusieurs pincées généreuses de graines d'anis vert histoire de rajouter quelque chose.

Le résultat est une excellente pâtisserie. Je l'ai préparée dans un grand plat rectangulaire préalablement chemisé (beurre/farine) pour pouvoir le démouler sans problème. La prochaine fois (car il y en aura une, c'est sûr), j'utiliserai des ramequins pour faire des mini pâtisseries individuelles.

Gâteau crémeux au potiron

Alors voilà : pas de plante sauvage dans cette recette, mais un peu de miel qu'on peut considérer comme semi-sauvage (on se raccroche à ce qu'on peut...).

dimanche 8 février 2009

Des dents de lion dans un chausson

Le pissenlit, également connu sous le nom de "dent de lion", fait partie de ces plantes sauvages dont tout le monde sait qu’elles sont comestibles mais que peu osent cueillir et surtout gouter. C’est encore plus marqué qu’avec les champignons. Et pourtant, il est beaucoup plus facile de trouver un coin à pissenlits qu’un coin à cèpes. Le terme de "coin" est d'ailleur très surfait tellement cette plante est commune.

D’un autre coté, il vaut peut-être mieux que tout le monde ne se jette pas dessus, au risque de devoir réellement préserver quelques coins secrets ... à l'instar des cèpes !

Chausson aux pissenlits accompagné de ficoïde glaciale, roquette et pissenlit

Ce week-end, je ne pensais pas avoir l’occasion d’une quelconque récolte. Heureusement, la neige tombée samedi avait presque disparu cet après-midi... Juste ce qu’il fallait pour une petite balade improvisée dans des chemins mêlant boue et neige à peine fondue. Et sur les bas cotés, quelques belles rosettes de pissenlits qui ne demandaient qu’à être cueillies, avec à leur coté quelques touffes de "ciboulette" (ail des champs).

Comme j’avais déjà fait le plein de salade au marché ce matin (roquette et ficoïde glaciale), c’est dans des chaussons que ces pissenlits ont fini. En voici la recette (dont je suis particulièrement content).

Chaussons aux pissenlits

Ingrédients (pour 4 chaussons) :

  • Pour la pâte :
    • 300g de farine
    • 100g de beurre
    • Une demi-tasse d’eau
    • 1 cuillère à café rase de sel
  • Pour la farce :
    • 200g de feuilles de pissenlits
    • 50g de vert de blettes (ou des feuilles d’épinard)
    • 120g de fromage frais de brebis
    • 40g de beurre
    • 100g de jambon
    • 1 poigné de ciboulette
    • 1 jaune d’oeuf
    • Sel et poivre
Chausson aux pissenlits accompagné de ficoïde glaciale, roquette et pissenlit

Préparation :

  • Mélanger la farine et la cuillère à café de sel
  • Ramollir le beurre et le mélanger avec la farine et l’eau
  • Réserver lorsque la pâte est homogène
  • Débiter les pissenlits (préalablement lavés) en morceau de 4cm de long maximum
  • Hacher grossièrement le vert des blettes
  • Faire fondre le beurre dans une poêle
  • Et jeter pissenlits et vert de blettes
  • Les cuire à feu doux en remuant régulièrement pendant 5 minutes
  • Ajouter le fromage frais débit en petits morceaux
  • Continuer de cuire pendant 5 minutes
  • Ajouter le jambon découpé en allumettes et la ciboulette hachée
  • Saler et poivrer
  • Cuire encore une minute et retirer du feu
  • Préchauffer le four à 200°C
  • Séparer la pâte en 4 boules de taille identique
  • Pour chaque chausson :
    • Etaler la pâte (2 à 3 mm d’épaisseur) de manière à former un ovale
    • Placer un quart de la farce en son centre
    • Humidifier les rebords de la pâte et la replier
    • Froncer les bords
  • Badigeonner les chaussons avec un peu de jaune d’œuf
  • Enfourner pour 25 minutes environ (j’ai oublié de regarder l’horloge)
Ficoïde glaciale

Note : Avec la roquette et quelques feuilles fraiches de pissenlit, la ficoïde glaciale va particulièrement bien avec les chaussons. C’est une plante originaire d’Afrique du Sud où elle existe à l’état sauvage. Elle est assez charnue et contient plein de petites vésicules remplies d’un liquide rafraichissant et légèrement salé. Idéale pour aller avec un chausson encore tiède... Si vous avez la chance d'en trouver sur un étal, n'hésitez pas.

mercredi 4 février 2009

Une tartine et je craque !

Ah les tartines...

Elles sont la raison pour laquelle je n’achète que peu de pain car je craque trop facilement. Mais quand j’en achète ou que je le fais moi-même pour le plaisir de le déguster encore chaud, il faut toujours que je trouve quelque chose à étaler dessus !

Bien entendu, pour qu’une tartine soit bonne, il y a la base : le pain. Et trouver du bon pain devient de plus en plus difficile. Aux noix, aux figues, aux lardons, aux deux, trois, quatre ou cinq céréales, à l’emmental, au roquefort, aux olives, aux oignons ... on a l’impression que la multiplication des produits se fait au dépend des classiques. Heureusement qu’en cherchant bien et en testant beaucoup, on trouve encore des artisans qui ont su préserver l'authenticité du pain.

Tartine de fromage frais aux herbes sauvages

L’élaboration d’une tartine peut amener à un assemblage complexe, un peu à la manière d’un parfum (toute proportion gardée) :

  • Au dessus, pour le plaisir des yeux et la note de tête : quelques copeaux de parmesan, des herbes hachées (ciboulette, basilic, persil, coriandre), un peu de poivre, des pignons de pin ou des cerneaux de noix concassés...
  • Vient ensuite la note de cœur : fromage, herbes, anchois, tapenade, tomate, viandes ou poissons séchés ou fumés...
  • Enfin le pain lui-même pour la note de fond : levain, seigle, complet, blanc, toasté, beurré, frotté à l’ail...

Mise en pratique immédiate avec deux plantes sauvages : ciboulette et cressonnette.

Tartine de fromage aux herbes sauvages

Tartine de fromage frais aux herbes sauvages

Ingrédients :

  • Quelques rosettes de cressonnette (cardamine hirsute)
  • Quelques brins de ciboulette
  • Fromage frais en faisselle (100g pour 50g d’herbes)
  • Ail
  • Pavé de campagne (pour faire de grandes tartines)
  • Sel et poivre

Préparation :

  • Bien égoutter le fromage frais
  • Hacher très finement la cressonnette (préalablement bien lavée)
  • L’incorporer dans le fromage frais
  • Ajuster l’assaisonnement (sel/poivre)
  • Réserver au frais pendant au moins une heure
  • Etaler ensuite sur des tranches de pain frottées à l’ail
  • Saupoudrer de ciboulette préalablement hachée
Rosette de cressonnette (cardamine hirsute)

Remarque : Bien que ce ne soit pas le cas général, il m’est arrivé de voir de la cressonnette les pieds dans l’eau. Dans ce cas, comme avec le vrai cresson, ne pas l’utiliser crue à cause des risques de douve.

dimanche 1 février 2009

Bientôt la Chandeleur

Samedi, j'étais invité chez Jeff et Cécile pour manger quelques crêpes. Comme je n'aime pas venir les mains vides, j'ai voulu confectionner quelque chose à amener qui aille avec les crêpes.

En général, un peu de beurre, du sucre et quelques gouttes de jus de citron font mon bonheur. Et c'est justement sur l'idée du citron que je suis parti en préparant une gelée au serpolet et au romarin. En effet, le serpolet que j'ai ramassé et séché cet été dans la Drôme a un léger parfum citronné.

Gelée serpolet-romarin

Gelée serpolet-romarin

Ingrédients :

  • Quelques poignées de serpolet séché
  • Un peu de romarin
  • 50cl d'eau
  • 200g de sucre roux
  • 300g de sucre blanc
  • 1 bonne cuillère à soupe de miel
  • 1 citron
  • Un sachet de pectine

Préparation :

  • Amener l'eau à ébullition et y verser le serpolet, le romarin
  • Laisser infuser 5 minutes
  • Filtrer
  • Ajouter le ju du citron, le sucre, le miel et la pectine
  • Ramener le liquide à ébullition pendant 5 minutes à nouveau
  • Verser dans des pots préalablement ébouillantés et séchés
  • Les refermer immédiatement
  • Laisser refroidir pour obtenir une gelée d'une belle couleur ambrée

Je suis assez content du résultat et je pense que la gelée a été appréciée. J'ai pensé trop tard à prélever les zests sur le citron pour les émincer et les joindre à la gelée. Ce sera pour une prochaine fois.

Serpolet séché

Sinon, pour ceux qui n'ont pas l'occasion de cueillir du serpolet, le résultat devrait être assez proche avec du thym. Et puis on peut aussi varier la recette avec d'autres plantes : de la verveine, de la citronnelle, du thé ou encore des fleurs d'hibiscus séchées (ma prochaine gelée je pense).

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