Ce billet a pour but de synthétiser les informations utiles pour ceux qui désirent se lancer dans la cueillette des plantes sauvages à des fins culinaires. J’essaierai de l’enrichir régulièrement sur la base de ma propre expérience, de vos commentaires ou encore d’ouvrages de référence.
Identification
En dehors des stages de formation, de l’assistance de pharmaciens, de botanistes ou d’amateurs éclairés, l’auto-apprentissage reste possible, mais il doit être mené avec une extrême prudence.
Quelle que soit la méthode d’apprentissage, il est important de posséder une documentation précise. Mais encore faut-il la comprendre. Procéder par étape et faire preuve de patience est primordial. Je vous conseille de commencer en faisant l’acquisition d’une flore simple qui permet tout d’abord de se familiariser avec les termes botaniques. En partant des plantes les plus communes et en les comparant avec leurs descriptions techniques, on comprend beaucoup plus rapidement ce que sont sépales, calices, anthères et autres pétioles. Pour cette première étape, un ouvrage tel que Fleurs sauvages (Larousse – Nature en poche) est idéal. Son format peu encombrant est parfait pour un sac à dos, et ses illustrations photographiques permettent d’avoir une première identification visuelle avant de se plonger dans les détails.
Lorsque les termes botaniques n’ont plus de secret pour vous, il est temps de passer au niveau suivant. Là, c’en est généralement fini des photos, on entre dans le domaine de la technique. Toujours pour un côté pratique (à cause de son format), je conseille la Nouvelle flore (Gaston Bonnier - Georges de Layens / Belin).
Mais la documentation ne fait pas tout car souvent, l’identification des plantes repose sur les fleurs. Or, lorsqu’une plante se résume à quelques pousses voire une simple rosette, la fleur n’est pas là pour donner de précieuses indications. C’est alors la mémoire et la patience qu’il faut faire travailler en observant au fils des jours, semaines, voire sur une année complète, l’évolution d’une pousse, jusqu’à son identification certaine.
Quoi qu’il en soit, la règle de base est toujours la même : en cas de doute, on ne consomme pas.
Equipement
Le couteau est le premier ustensile du cueilleur. Il évite d’arracher les racines lorsque celles-ci ne font pas partie des éléments exploitables. En coupant net pédoncules et pétioles, il évite de les écraser, ce qui permet de conserver la récolte plus longtemps. Il permet aussi d’éliminer rapidement les parties abimées et la terre.
J’utilisais un Opinel il y a encore un an mais avec l’humidité, le bois du manche a gonflé et l’anneau de blocage de la lame ne tourne plus. J’utilise maintenant un laguiole : pas encombrant, bonne lame, et le manche 100% acier de ce modèle ne craint ni l’eau, ni la terre. Il m’a même servi plusieurs fois à déterrer des racines de panais. Si vous voulez qu’il dure, il faut toujours le nettoyer, bien le sécher et huiler la lame de temps en temps.
La récolte, il faut ensuite la transporter. Les sacs plastiques sont à éviter lorsqu’on le peut mais ils sont quand même bien pratiques si on veut se balader léger. Ils ont malheureusement tendance à faire transpirer les plantes et à les flétrir, surtout lorsqu’il fait chaud. Ca a pour principal conséquence d’écourter la durée de conservation de la récolte. L’idéal reste bien entendu le panier qui évite que la récolte soit écrasée tout en la laissant respirer. Entre les deux, il y a le sac en toile que j’utilise assez fréquemment. Pas doué pour la couture, je m’en suis fait fabriquer un sur le modèle des anciens sacs utilisés pour la récolte de la lavande. Ceux découverts au fond d’une armoire dans la maison familiale drômoise étaient un peu trop troués et trop grands de toute façon (pratiquement 80 cm de profondeur). Si ça vous tente : un torchons plié en deux, cousu sur les cotés avec une lanière un peu épaisse ou un lacet pour faire bandoulière.
L’appareil photo est aussi très pratique. Comme on ne peut pas toujours trimballer une dizaine de bouquins avec soit, il arrive qu’on ne soit pas en mesure d’identifier une plante sur place. Quelques photos judicieusement prises évitent la frustration de constater que la plante n’a pas supporté le voyage.
Précautions
Le lieu de récolte a son importance.
On évitera généralement les bordures de route (métaux lourds), la proximité des usines, les jardins (herbicides), les champs cultivés et leurs abords (pesticides et autres produits dits phytosanitaires).
On évitera également les pâturages et leurs environs immédiats pour les plantes mangées crues. Beaucoup d’animaux sont en effet porteurs de parasites qu’on retrouve dans leurs excréments et donc parmi les végétaux environnant.
Enfin, on fera particulièrement attention avec les plantes aquatiques. Outre les risques de parasite (le plus connu est la douve du foie), il y a également les risques de pollution amont ou par ruissellement.
Espèces protégées
Parmi les plantes comestibles, il y aussi des espèces protégées. Certaines le sont au niveau national, d’autres seulement au niveau régional. Je vous invite à consulter le site web de Benoit BOCK qui les répertorie toutes. Par ailleurs, dans certaines zones délimitées comme les réserves naturelles, toute cueillette est interdite. Et même lorsqu’il n’y a pas d’interdiction, on évitera les abus. A l’exception de certaines espèces indésirables et envahissantes (renouée du Japon par exemple), la modération est donc de rigueur. |
Contre-indications
Si quelques plantes sauvages ont si peu de contre-indications qu’on peut les manger les yeux fermés, c’est loin d’être le cas général. Certaines ont des tendances allergènes, d’autres contiennent des substances dont il ne faut pas abuser au risque de perturber l’organisme. Un cueilleur ayant des problèmes rénaux ou hépatiques devra faire particulièrement attention. Une cueilleuse enceinte évitera les plantes crues de manière générale, mais fera également attention aux propriétés abortives de certaines (armoise par exemple).
Il faut noter que certaines de ces contre-indications sont également valables sur des plantes cultivées de consommation « courante » comme par exemple les épinards, l’oseille, la rhubarbe (oxalates et acide oxalique).
Chaque fois que je teste une nouvelle plante, j’essaie de consulter plusieurs ouvrages pour bien identifier toutes les contre-indications possibles. Certaines contre-indications font encore polémique et les auteurs ne sont pas forcément tous d’accord entre eux. Dans ce cas, je me base sur l’histoire de la plante : si celle-ci était consommée autrefois, ça veut dire qu’on peut au moins la goûter une fois sans risquer l’empoisonnement. Ma référence dans le domaine est le Guide des plantes sauvages comestibles et toxiques (F.Couplan - E.Styner / Delachaux et Niestlé).
Préparation
Il faut toujours bien nettoyer plusieurs fois la récolte à l’eau, et à l’eau vinaigrée, surtout pour les salades. Ce nettoyage est préventif mais n’est pas 100% efficace. Même bien nettoyées, on évitera par exemple de consommer crues les plantes sauvages aquatiques ou poussant en milieu très humides à cause des risques de parasites comme la douve du foie.
Contre ce type de parasites et de manière plus globale contre les micro-organismes hostiles, la cuisson est la solution radicale. Comme pour tout aliment, une cuisson vapeur (proche de 100°C) permettra de conserver une bonne partie des propriétés des plantes alors qu’une cuisson plus violente (poêle, four, friture) détruira la majorité des molécules complexes telles que les vitamines.
Excellents conseils. merci.
RépondreSupprimerQuelle mine d'informations ! Merci de cette générosité !
RépondreSupprimerBonjour
RépondreSupprimerJe recherche un ouvrage (le plus complet possible) permettant l'identification des plantes et des fleurs avec des photographies. Je n'accroche pas sur ce point avec les Delachaux qui utilisent tous des dessins (j'ai malgré tout le Guide des plantes comestibles et toxiques de Couplan).
Il est difficile de trouver qq chose de satisfaisant en librairie et difficile de commander sans avoir feuilleté!
Merci d'avance pour tes conseils
A celesteen :
RépondreSupprimerPour les photos, je peux t'en conseiller deux (remarque : ne jamais se baser uniquement sur une photo pour identifier une plante, surtout si c'est pour la consommer...). Mais dans l'un comme dans l'autre, il y a quelques absences et le sujet de la comestibilité n'est pas abordé.
Le premier, Fleurs sauvages (Larousse - Nature en poche), est le moins complet des deux, mais comme son nom l'indique, il tient dans une grande poche. Il est idéal pour se balader.
Le second, Encyclopédie visuelle des plantes sauvages (par Jean-Marie Polese / Artémis éditions), est plus complet et aussi plus riche en photos (généralement plusieurs par plante). Il est par contre intransportable en balade.
j'aurais du me prémunir avant d'un bon guide, au lieu de me fier à mes connaissances..limitées..merci pour ces titres d'ouvrages..
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