mardi 5 mars 2019

Retour

Comme annoncé sur la page Facebook du blog, après plusieurs mois d'inactivité, Sauvagement-Bon est de retour.

L'inactivité n'était que d'apparence car beaucoup de choses se sont passées pour moi, qui si tout se passe bien, devraient me permettre de lancer un tout nouveau projet dont j'espère pouvoir vous parler dans les mois à venir.

Vous me reconnaissez ?
En attendant, j'avais décidé de prendre un peu de bon temps en allant passer le mois de février en Nouvelle-Zélande. Difficile de faire plus lointain comme destination en restant sur Terre. Mais il y a un avantage aux plus de 24h de vol nécessaires pour atteindre ces deux grandes îles (et aux 12h de décalage horaire) : lorsque c'est l'hiver ici, c'est l'été tout là-bas !

Je ne vais pas vous faire un compte-rendu détaillé de ce voyage, mais tout en restant dans la thématique du blog, j’espère pouvoir vous faire découvrir un peu de ce magnifique et très surprenant pays au travers de quelques articles.

J’étais parti sur place en ayant préparé un parcours basé sur les principales (et très nombreuses) curiosités naturelles que compte la Nouvelle-Zélande, espérant aussi découvrir au grès de plusieurs randonnées quelques plantes sauvages remarquables et si possible intéressantes du point de vue culinaire. Et si les découvertes ont été au rendez-vous, elles se sont aussi révélées la source d’une petite frustration pour moi : la difficulté de vraiment cuisiner lors d’une itinérance de chambres d’hôtes en chambres d’hôtels ou de motels, que ce soit au niveau du matériel ou au niveau des ingrédients de base. Fort heureusement, beaucoup sont équipés d’un four micro-onde et parfois même de plaques électriques ainsi que des ustensiles de base.
Bien que très confortables, les chambres de cet hôtel ne disposaient d'aucun équipement de cuisine. Ce n'était heureusement pas le cas pour la plupart de mes autres escales.
Par contre, je ne m’étais pas du tout préparé du point de vue botanique, comptant sur mes connaissances générales et surtout sur internet pour le reste (ne disposant pas de références papier adéquates, pas le choix).
En effet, s’agissant d’une île plutôt isolée, on se retrouve avec plusieurs populations végétales mêlant de nombreuses espèces endémiques (80% des espèces selon certaines références), des espèces de l’hémisphère Sud (dont beaucoup ont été apportées à l’arrivée des Māori entre les VIIIè et XIIIè siècles selon les régions et les sources) et des espèces de l’hémisphère Nord (dont la plupart ont été introduites par les Européens depuis la « découverte » de la Nouvelle-Zélande par Abel Tasman en 1642).
Un exemple parmi tant d'autres d'une espèce endémique que j'ai eu l'occasion d'observer (au pied du Mont Ruapehu pour celle-ci) : thelymitra pulchella, ou « striped sun orchid » en anglais (qu'on pourrait traduire par « orchidée du soleil rayée »). Comestibilité inconnue, mais est-ce vraiment important pour une si belle orchidée.
Honneur aux espèces locales, c'est donc par une plante endémique que je vais commencer. Je l’avais tout d’abord repérée dans les environs de Dunedin (côte est de l’île Sud), à l’occasion d’une balade vers Tunnel Beach. Elle se trouvait en bordure de falaise, à portée des embruns régulièrement projetés par les vagues se brisant sur les falaises.
Tunnel Beach
A la vue des tiges charnues, j’avais tout de suite pensé à de la salicorne, mais au moins deux différences étaient visibles à l’œil nu :

Ne serait-ce pas de la salicorne ? On aperçoit même les petites fleurs blanches sur le haut des tiges.
1 - La couleur d’abord, et c’est le plus frappant :
Du vert au violet en passant par le gris argenté, le jaune et le rouge. Et le plus étonnant, c’est qu’on peut retrouver toute cette palette en tâches sur quelques dizaines de mètres carrés.
Certes, on approche de la fin de saison et il arrive aussi à notre salicorne de tirer vers le rouge à la fin de l’été, mais ici, il ne manque que le bleu pour avoir l’arc-en-ciel dans sa totalité !

2 - La quasi-absence de ramifications sur la partie aérienne :
Alors que des branches poussent régulièrement sur toute la hauteur de la tige principale de la salicorne européenne, ici, on retrouve de grandes tiges droites sans branche, ou presque. Les ramifications ne se retrouvant pratiquement que sur la partie rampante des plants.

Bien que ressemblant fortement à la salicorne, rien ne disait que cette plante en avait aussi la comestibilité. Après quelques recherches sur internet, l’espèce est rapidement identifiée : sarcocornia quinqueflora, « ureure » en māori (se prononce « ou-ré-ou-ré ») ou « glasswort » en anglais (nom également utilisé pour la salicorne européenne, dont l'origine est à chercher dans l’utilisation qui était faite des cendres de la plante pour la fabrication du verre).
Sarcocornia quinqueflora, « ureure » en māori ou « glasswort », un genre botanique différent, mais proche de celui de la salicorne européenne (salicornia).
Cette « salicorne australe » (je n’ai pas trouvé de nom vernaculaire français) est quasiment endémique de la Nouvelle-Zélande (on la trouve également en Australie). Elle est omniprésente sur toute la côte de l’île nord et sur une partie de celle de l’île sud. Et surtout : elle est comestible.

Ce n’est que plus tard que j'ai pu y goûter, lorsque l’occasion s'est présentée d’en trouver dans un endroit où la cueillette n’était pas interdite (j’ai beaucoup fréquenté les parcs nationaux et autres réserves biologiques où la cueillette est strictement interdite) mais aussi dans un endroit sain.
Les marais salés d'un estuaire entre Christcurch et Blenheim. Les zones inondées par les marées hautes sont intégralement bordées de cette salicorne multicolore.
Toutes les conditions ont été réunies dans un estuaire sur le chemin de Blenheim (nord-est de l'île Sud).
Un véritable arc-en-ciel de salicornes.
Et enfin j'ai pu la déguster...

Crue : On retrouve le goût salé de la salicorne, ce qui n’a rien d’étonnant dans la mesure où la plante pousse à portée de marée, mais une saveur légèrement poivrée vient aussi agréablement titiller les papilles.

Cuite : Trop salée pour être consommée crue comme légume, une cuisson dans de l’eau permet d’éliminer une partie du sel contenu par la plante. On y perd un peu en goût poivré, mais on y gagne en finesse et en tendreté.

Et voici donc comment j’ai pu la préparer avec les moyens du bord, c’est-à-dire avec à disposition un micro-onde (et pas de plaque de cuisson), des ingrédients trouvables en petite quantité en supermarché et même pas de table !

Saumon poché aux salicornes du bout de monde,
crème au vin blanc de Waipara

Ingrédients :
  • Salicornes (50g / personne)
  • Pavés de saumon (120g / personne)
  • Fromage Philadelphia (1 portion individuelle, soit 16,7g / personne)
  • Vin blanc (1 demi verre à vin, soit 7cl / personne)
On remarquera le décor (le rebord d'un évier, seul emplacement disponible dans mon « habitation » du moment) ainsi que la capsule à droite de la bouteille de vin (le liège est plutôt réservé aux vins de garde, et la capsule est très pratique lorsqu'on ne dispose pas d'un tire-bouchon).
Préparation :
  • Placer la salicorne dans un récipient allant au micro-onde et la couvrir intégralement d’eau et laisser reposer pendant 1h au frais (permet de commencer à dessaler).
  • Placer ensuite le tout au four micro-onde et cuire à puissance maximum pendant au moins 10 minutes (peut nécessiter 20 minutes sur des petits fours moins puissant).
  • Recommencer de la même manière avec le saumon, mais une cuisson un peu plus courte si vous l’aimez bien fondant.
  • Mélanger le fromage et le vin blanc à froid et chauffer rapidement le tout au four micro-onde pour obtenir une sauce crémeuse.
  • Dresser en émiettant le saumon et en le mélangeant avec la salicorne avant de napper avec la sauce (avec le sel de la salicorne et sa saveur poivrée, aucun autre assaisonnement n’est nécessaire).
Notes :
Bien que je me sois régalé, si j’avais eu à ma disposition une vraie cuisine et la possibilité d’avoir de la crème dans une quantité inférieur à 1 litre, j’aurais cuit la salicorne dans une casserole (10 minutes dans l’eau bouillante à partir de l’ébullition), j’aurais probablement utilisé un autre poisson (un poisson blanc comme du loup par exemple, avec peau) et je l’aurais cuit à la poêle dans un filet d’huile d’olive. Au niveau de la sauce, j’aurais porté le vin à ébullition dans une casserole, j’aurais ajouté un peu d’ail finement haché et en lieu et place du fromage industriel j’aurais rapidement incorporé de la crème fraîche, juste le temps que l’appareil soit homogène et à température. J'aurais aussi utilisé un vin différent. J'avais acheté un riesling de la vallée de Waipara, m'attendant à un vin plutôt sec, comme pourrait l'être un riesling alsacien. Or, dans sa version néo-zélandaise, ce même cépage donne un vin plus doux (sans pour autant être moelleux) et manque d'acidité pour la sauce. Un chardonnay de la même région aurait probablement mieux fait l'affaire.

5 commentaires:

  1. Ravie de pouvoir de nouveau lire vos billets!
    Quelles belles photos, ça a du être un magnifique voyage...

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  2. Merci pour ce voyage par procuration, vous avez dû vous régaler avec tous ces oiseaux, ces plantes à découvrir... Splendide !

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  3. je vous suis depuis des années! Merci de vous lire à nouveau!

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  4. Nicolas...le retour! quel plaisir de vous retrouver sur le blog, j'espère pouvoir vous lire encore prochainement!
    Merci pour cette belle découverte

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  5. c'est en recherchant la recette de la tarte à l'ail des ours que je suis retournée sur votre blog...quel plaisir aussi de vous retrouver!!!

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